Extrait retrouvé dans un carnet. Aucune date. Juste une voix.
Un souvenir. Une vérité.

J’avais oublié à quel point tu étais vivante.
Crue. Insolente. Presque sauvage.
Tu disais tout.
Tu riais fort.
Tu posais des questions qui dérangeaient.
Et tu croyais encore qu’on pouvait tout faire, juste parce qu’on le sentait.
Je ne sais pas à quel moment je t’ai perdue.
Peut-être le jour où on m’a dit:
“Ce n’est pas comme ça qu’on se tient.”
Ou celui où j’ai compris que pour être aimée, il fallait être gentille.
Prudente.
Stratégiquement douce.
Alors j’ai commencé à t’étouffer.
Un peu.
Beaucoup.
Tous les jours.
Je me suis maquillée de silences.
Je suis devenue polie.
Aimable. Brillante—mais jamais trop.
J’ai appris à dire ce qu’on attendait.
Àpenser ce qui se dit.
À être tout, sauf ce que tu étais.
Et tu as disparu.
Pas d’un coup.
Mais petit à petit.
Comme une flamme sans oxygène.
Comme une vérité qui se tait pour survivre.
Mais aujourd’hui…
En relisantces lignes griffonnées,
En entendantta voix vibrer sous la mienne,
Je me souviens.
Tu es encore là.
Sous la poussière.
Sous la performance.
Sous la femme construite.
Et j’ai mal.
Pas parce que je t’ai abandonnée.
Mais parce que je t’ai oubliée.
Alors cette lettre,je ne la relis pas.
Je l’ouvre.
Je l’honore.
Je t’accueille.
Tu peux revenir maintenant.
Même si tu es intense.
Même si tu fais peur.
Même si tu déranges.
Tu n’as pas besoin d’être sage.
Tu as besoin d’exister.
Et cette fois,
Je ne te ferai plus taire.


Signature :
Moi.

Celle que tu étais.
Celle que tu es encore.
Celle qui revient.

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